Un florilège d’œuvres remarquables

Inguimbertine - Culture - Tourisme - Loisirs

Près de 300 années de collectes, d’achats, de dons d’oeuvres et d’objets depuis dom Malachie d’Inguimbert jusqu’aux dernières acquisitions réalisées récemment (voir Carpentras magazine n°183) expliquent la richesse et la diversité des fonds qui constituent les collections de la Bibliothèque musée. Parmi les oeuvres les plus remarquables nous avons osé nous lancer dans l’exercice périlleux d’en choisir et de vous en présenter quelques-unes dans l’espace limité de ces deux pages ; choix arbitraire, certes et subjectif, sans doute. À vous bientôt de constituer votre florilège au sortir d’une visite et pourquoi pas de nous en faire part.

Globe terrestre, Amsterdam :

Willem Blaeu, (1571-1638)

Armature en bois et plâtre, fuseaux imprimés à partir de plaques de cuivre gravés à l’eau forte et au burin, rehaussés à l’aquarelle ; globe monté sur ébénisterie. Willem Blaeu est un célèbre imprimeur cartographe installé à Amsterdam. Il édite notamment de prestigieux globes, modélisant la terre et le cosmos, objets sphériques avec structure en bois et plâtre sur laquelle sont collées des bandes de papier imprimés (fuseaux) représentant la terre ou le ciel, parfois réhaussés de couleur. Sur ce globe terrestre édité en 1622, la firme Blaeu a été soucieuse de figurer des informations fiables et actualisées. À cet effet, de nombreuses inscriptions localisent les faits marquants des grandes découvertes : par exemple le passage du Cap de Bonne Espérance par Vasco de Gama, les itinéraires de Magellan et Francis Drake autour du monde. Surtout, ce globe retranscrit des découvertes toute récentes, notamment, celle, retentissante, de Willem Schouten et Jacob Le Maire, marins hollandais qui ouvrent une nouvelle voie vers le Pacifique par le Cap Horn lors de leur expédition en 1615-1616. Outre les voies maritimes, le globe terrestre témoigne de l’état de la connaissance des terres continentales. Le savoir précis de l’Europe et de l’Asie se lit dans le dense réseau de villes et localités qui y est mentionné. Inversement, les terres intérieures de l’Afrique et de l’Amérique restent à explorer, de même que les côtes de l’Amérique du Nord. L’Australie n’est pas encore découverte.

La Danseuse au tambourin

Huile sur toile, Perse, vers 1820.

De son voyage en Iran, Jules Laurens a rapporté des œuvres produites sous la dynastie des Qajars, régnant de 1786 à 1925. Les quatre peintures de grand format provenant vraisemblablement d’un même ensemble devaient orner un palais de Fath’Ali Shah (règne : 1797 à 1834). Les figures du guerrier et des danseuses richement apprêtées qui entourent le portrait du Shah servent son prestige. L’art iranien au XIXe siècle adopte la technique occidentale de la peinture à l’huile sur toile mais reste attaché aux traditions orientales de la peinture en deux dimensions. Les personnages sont figurés frontalement, sans souci du modelé et de la profondeur, et se détachent d’un fond où la perspective est évoquée par une colonne ou une fenêtre. Sur ces grands aplats, l’artiste se concentre à peindre avec un soin et une exactitude remarquable chacun des détails du visage, du vêtement et des parures.

Farniente

Adda Cabane (Montpellier, 1823 – Paris, 1889) - Huile sur toile, 1908.

Première femme de Vaucluse à exposer au Salon, en 1901, Adda Cabane est une artiste de talent comme le montre ce tableau, plein de naturel, de spontanéité et de dynamisme, acheté par l’État et déposé au musée de Carpentras. Adda ne fera pas de la peinture son métier, se consacrant à son rôle d’épouse et de mère.

La Poissonnerie

Frans Snyders (Anvers, 1579 – Anvers, 1657) - Huile sur toile, première moitié du XVIIe siècle. Dépôt de l’État - Musée du Louvre.

Frans Snyders, célèbre peintre anversois, compose une scène de genre dans un très grand format normalement dévolu à la peinture d’histoire. Cet étal de poissonnier situé sur une plage déploie une abondante faune aquatique dans un foisonnement de courbes et contre-courbes typique de l’art baroque. Peintre animalier reconnu, il y représente avec précision chaque espèce : poissons, crustacés, mammifères aquatiques et terrestres (chien, chats, humains). Frans Snyders a produit plusieurs tableaux monumentaux figurant ces étals de victuailles situés à Anvers, rappelant la splendeur passée de ce port flamand en déclin au XVIIe siècle. Cette composition exprime aussi une leçon morale : l’artiste a caché dans la masse foisonnante de cette pêche une histoire émouvante, située dans l’angle inférieur à notre gauche. On y voit un phoque s’interposer entre son bébé et un chien. Mais celui-ci par son regard signale un chat, animal quasi sauvage en ce temps, à connotation maléfique, qui constitue la véritable menace pour le petit phoque. On a là une scène dont la morale pourrait être que le danger n’est pas toujours où on le croit.

Rencontre à la Porte dorée

Nicolas Dipre (actif à Avignon entre 1495 et 1532), Huile sur bois, entre 1499 et 1501. Ce panneau est le dernier témoin du retable commandé en 1499 au peintre avignonnais Nicolas Dipre par la confrérie de l’Immaculée Conception pour orner leur chapelle à la cathédrale Saint-Siffrein de Carpentras. Selon la légende, de ce baiser échangé entre Anne et Joachim à la porte dorée du temple de Jérusalem naquit Marie. Quoiqu’influencée par l’art italien, cette peinture s’inscrit dans le style gothique, dénigré depuis la Renaissance. Pourtant, au coeur du XVIIIe siècle où triomphe le goût classique, d’Inguimbert manifeste un intérêt précurseur pour cet art en exposant ce fragment dans sa bibliothèque.

Carpentras magazine n°185 - Sommaire